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Quatrième bilan de la CSW58 : Vendredi 28 mars 2014

CONCLUSIONS CONCERTÉES DE LA CSW58

Les négociations de cette année à la CSW ont été très houleuses, comme à l’habitude, mais aussi très importantes, à la lumière de la définition du nouveau cadre de développement qui remplacera les OMD en 2015. Pour cette raison, les défenseures, les organisations et les mouvements de droits des femmes n’ont ménagé aucun effort pour, d’une part, protéger le langage existant, mais aussi faire pression pour son renforcement, afin que les Conclusions concertées (CC) prennent des engagements clairs en matière d’égalité des genres et de droits humains des femmes.

Le document reconnaît, ce qui est fort important, que « près de 15 ans après le lancement des OMD, aucun pays n’a atteint l’égalité pour les femmes et les filles, et d’importantes inégalités entre les femmes et les hommes subsistent ». Cela met aussi en relief le non-traitement ou la mauvaise intégration de plusieurs enjeux cruciaux aux OMD, notamment : la violence à l’égard des femmes et des filles ; le mariage des enfants et le mariage précoce ou forcé ; le travail non rémunéré, notamment le travail soignant, disproportionnellement accompli par les femmes et les filles ; l’accès des femmes à un travail décent, l’écart salarial selon le genre, le secteur informel, ainsi que le travail à bas salaire et à prédominance féminine, comme le travail domestique ou le travail soignant ; l’accès des femmes au contrôle et à la propriété des biens et des ressources productives, notamment les terres, l’énergie et le carburant, ainsi que les droits de succession des femmes ; la santé et les droits des femmes et des filles en matière de reproduction.

Cependant, la géopolitique actuelle et les représailles conservatrices, thèmes récemment abordés au Dossier du vendredi, étaient palpables la semaine dernière lors des dernières journées de négociation, qui ont pris fin avec l’adoption des CC. Le document final fut généralement bien accueilli par les défenseures, organisations et mouvements de droits des femmes.

Le bon

On compte parmi les victoires des CC certaines références explicites au besoin d’apprendre des leçons des OMD dans la définition de l’après-2015, de façon à faire pression sur les États pour qu’ils « s’attaquent à des problèmes de première importance en employant une approche transformatrice et compréhensive et à exiger que l’égalité des genres, l’autonomisation des femmes et les droits humains des femmes et des filles fassent l’objet d’une cible distincte et soient intégrés par l’entremise de cibles et d’indicateurs dans tous les objectifs de tout nouveau cadre de développement ».

On constate également dans les CC un langage très clair contre la violence à l’égard des femmes et des filles, faisant explicitement référence à l’élimination des pratiques coutumières dangereuses, dont la mutilation génitale féminine (MGF), le mariage des enfants ainsi que le mariage précoce ou forcé en vertu de la loi. Les CC mentionnent en outre les catastrophes naturelles et le changement climatique, ce qui est fort important, en dépit d’une absence de référence aux responsabilités communes, mais différenciées. Le rôle des médias dans l’élimination des stéréotypes genrés, pour sa part, a fait aussi l’objet d’une mention.

Qui plus est, le document reconnaît le rôle important que jouent les féministes ainsi que les organisations des femmes et communautaires dans l’intégration des intérêts, besoins et visions des femmes aux programmes nationaux, régionaux et internationaux.

Les défenseures des droits des femmes ont lutté âprement pour que le langage restrictif concernant les familles, qui ne reconnait pas la diversité des types de familles, ne fasse pas partie du texte final, de même que certaines références à la souveraineté, qui aurait pu devenir des échappatoires permettant aux États de fuir leurs responsabilités.

En dépit de la grande résistance de l’opposition conservatrice, les CC emploient certains éléments du langage de la santé et des droits sexuels et reproductifs (SRHR, depuis son sigle anglais), notamment l’accès aux services d’avortement, là où légal, ainsi que certaines mentions de l’éducation à la sexualité compréhensif.

Le mauvais

Cependant, comme il en est devenu la norme à la CSW, les enjeux les plus contestés ont fait l’objet de négociations tendues : une minorité de gouvernements conservateurs, notamment le Saint-Siège, a bloqué les négociations en s’opposant à des concepts aussi fondamentaux que le genre et les droits humains des femmes. Le Saint-Siège, qui ne bénéficie que d’un statut d’observateur spécial à l’ONU, est même allé jusqu’à mettre en question la légitimité du processus de la CSW ainsi que son document final.

Les CC ne reconnaissent pas la Déclaration et le Programme d’action de Vienne (VDPA, depuis son sigle anglais), issus de la Conférence mondiale sur les droits de l’homme tenue à Vienne il y a 20 ans. On a constaté en outre, tout au long des deux semaines de négociations, que l’indivisibilité des droits humains était mal reconnue. Il manque aussi dans les CC un langage propre à la violence et à la discrimination subies en raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre (OSIG), réelles ou perçues. Cette absence est manifeste en dépit des principes de droits humains, dont le noyau est la non-discrimination, élément nécessaire à leur défense.

La Commission n’est en outre pas parvenue à faire le lien entre le développement durable – un concept multidimensionnel aux dimensions écologiques, économiques et sociales – et le respect des droits sexuels et reproductifs, ainsi que la diversité en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre. L’absence d’une mention particulière relative aux groupes marginalisés dans le texte signifie aussi l’exclusion des droits des travailleuses et travailleurs sexuels.

Occasions manquées

Bien que la Commission ait reconnu les crises financières et économiques du monde, elle n’est pas allée assez loin en ce qu’elle n’a pas reconnu leurs impacts négatifs sur le développement, ni le besoin d’établir des réglementations et de demander des comptes aux responsables. La Commission a aussi raté l’occasion de reconnaître la nécessité de changer la structure du modèle économique actuel ainsi que de faire des liens entre l’économie et le développement. Qui plus est, on a dilué le langage fort concernant l’augmentation de l’efficacité des ressources financières dans tous les secteurs pour la réalisation de l’égalité des genres, en ce que le nouveau document demande à ce que les mécanismes de financement novateurs volontaires soient adéquats plutôt qu’alignés aux obligations existantes en matière de droits humains. La reddition de compte des acteurs étatiques et non étatiques quant à la promotion de l’égalité des genres, des droits des femmes et de l’autonomisation des femmes a également été exclue des CC finales, tout comme l’accès aux réparations et au dédommagement.

L’année dernière, les défenseures des droits des femmes n’ont ménagé aucun effort en vue de l’inclusion d’un nouveau langage sur les femmes défenseures des droits humains dans les CC. Si la Commission de cette année reconnaît le rôle public et légitime des femmes défenseures des droits humains dans la défense des droits humains, de la démocratie, de la primauté du droit et du développement ; elle a toutefois raté l’occasion d’inclure un langage contre l’impunité relative au harcèlement, à la criminalisation et à l’agression que subissent les femmes défenseures à cause de leur identité ou de la nature de leur travail.

Lettres et déclarations

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Analyses
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AWID