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La 38e session du Conseil des droits de l'homme : 7 points à garder en ligne de mire

Cette session du Conseil des droits de l'homme (CDH38), qui se tient chaque année entre juin et juillet, porte en particulier sur les questions liées au genre et à la sexualité.

Cela implique qu’une discussion annuelle d'une journée sur les droits humains des femmes se déroulera en deux sessions (le 21 juin entre 16h et 18h et le 22 juin entre 10h et 12h), ainsi qu'un certain nombre de résolutions anticipées concernant l'égalité de genre et les droits des femmes. Une série d'événements et de rapports qui intéresseront les féministes seront également présentés lors de cette session.

Si vous n'êtes pas à Genève, vous pouvez suivre son déroulement en ligne car certaines parties du programme seront diffusées en direct sur UN Web TV. Nous posterons également des mises à jour sur notre compte Twitter @AWID ainsi que des liens vers des événements diffusés en direct (en streaming) sur notre page Facebook.

Etant donné le programme bien rempli de ce Conseil, vous vous demanderez peut-être par où commencer ? A cet effet, nous avons dressé une liste de points clés à surveiller (dont une apparition papale pour le moins inattendue !).

Résolutions importantes

Des résolutions sur la violence à l'égard des femmes et la discrimination à l'égard des femmes sont prévues : la résolution sur la violence contre les femmes aborde la question de la violence en ligne et la résolution de la discrimination à l’égard des femmes met l'accent sur la discrimination sexuelle sur le lieu de travail et dans la sphère économique.

Parmi d'autres résolutions intéressantes à suivre, l’une d’elles concernera la société civile et une autre la question des manifestations pacifiques. Suivez-nous via nos comptes sur les médias sociaux pour en savoir plus sur la protection des défenseur-e-s des droits humains : progrès ou recul continu par l’action de l'État ?

En outre, le groupe africain (un groupe de 54 États africains) parraine une résolution sur l'éradication des mutilations génitales féminines (MGF), qui semble être en passe de devenir la cible d'actions anti-droits relativistes sur le plan culturel.

Dans une résolution qui sera également abordée dans cette session, le Vietnam, le Bangladesh et les Philippines abordent la question clé des droits humains dans un contexte de changement climatique ainsi que son impact sur les femmes.

Un rapport musclé du Groupe de travail sur la question de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique condamne l'instrumentalisation de la religion, de la culture et de la tradition

Un grand thème à surveiller est le rapport publié par le Groupe de travail sur la question de la discrimination contre les femmes dans la législation et dans la pratique. A l’heure où un nouveau groupe de membres reprend ce mandat, ce rapport se penche sur les six années de mandat des membres du groupe de travail sortant.

Il s’agit d’un rapport audacieux et tourné vers l'avenir, qui n'hésite pas à désigner les « mouvements qui s'opposent à l'universalité des droits des femmes et qui contribuent ainsi à fragmenter et fragiliser le système des droits humains ».

Ce qui est particulièrement puissant, c'est la référence directe aux divers discours utilisés par les acteurs anti-droits, y compris au sein même du Conseil.

« Le Groupe de travail a observé comment des concepts tels que « la complémentarité », « l’équité » et « la protection de la famille » ont été instrumentalisés pour saper les droits des femmes, défiant ainsi les droits humains universels en ce qui concerne l'égalité et la non-discrimination. »

« Le concept de genre a été contesté, mal compris et mal utilisé [...] Les groupes conservateurs soutiennent que le droit international n’interdit que la discrimination sexuelle, niant que le terme « genre » est largement utilisé dans les normes internationales et ce, depuis les années 1970 ».

Leurs mises en garde font écho à bon nombre des problèmes clés que nous avons soulevés avec l'initiative OURs, dans le cadre de notre rapport intitulé Nos droits en danger.

Sans surprise, étant donné son contenu, il est prévisible que ce rapport sera vivement critiqué dans certains milieux. En attendant, les organisations féministes et des droits des femmes se sont rassemblées pour accueillir ce rapport et ont diffusé une déclaration qui stipule que :

« Nous souscrivons aux préoccupations du Groupe de travail sur l'instrumentalisation de la famille et de concepts tels que « la complémentarité » et « l’équité » dans le cadre d'une stratégie visant à remettre en cause les droits humains universels des femmes et des filles relatifs à l'égalité et à la non-discrimination et conformes au droit international relatif aux droits humains ».

L'AWID co-parrainera également un événement (le 22 juin à 13h) avec le Groupe de travail sur la question de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique et avec nos partenaires afin d’approfondir les questions soulevées dans le rapport. Pour celles et ceux qui ne peuvent pas nous rejoindre à Genève, nous diffuserons l'événement en direct sur notre page Facebook.

#Feminists4BindingTreaty (féministes pour un traité juridiquement contraignant)

Au cas où vous l’auriez manqué, un groupe extraordinaire de féministes s’est exprimé sur la question des impacts en termes de genre des violations des droits humains et s'est mobilisé en faveur d’un projet de traité juridiquement contraignant pour responsabiliser les sociétés transnationales quant à l'impact de leurs activités dans le monde.

L'AWID sera à Genève pour faire progresser ce projet. Nous organiserons un événement intitulé Les droits des femmes par delà les arguments économiques – Repenser le système économique et mettre un terme à l'impunité des entreprises (27 juin, 14h) en partenariat avec la WILPF, le CAL, CIEL, DAWN, ActionAid, la FIDH, FIAN International, le CELS et ses partenaires. Notre objectif est de faire progresser le débat sur les droits humains des femmes par delà les arguments de rentabilité et discuter des raisons pour lesquelles l'impunité des entreprises est une question féministe.

Suivez l'événement sur la page de Facebook, (en anglais seulement), et contribuez à la discussion via Twitter en utilisant le hashtag #Feminists4BindingTreaty

Trans Advocacy Week (semaine de plaidoyer trans)

Tout au long de la première semaine du Conseil (du 17 au 23 juin), des activistes trans du monde entier participeront à la Trans Advocacy Week, une initiative conjointe de l’APTN, GATE, ILGA, RSFL et TGEU, pour aborder le thème de la marginalisation historique des questions trans dans le programme de l’ONU sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre (SOGI).

Les activistes trans participeront à la Consultation ouverte sur la reconnaissance légale du genre et la dépathologisation. La délégation participera également à deux événements parallèles – L’Intégration transversale de l'identité et de l'expression de genre dans le travail féministe et l’égalité de genre (le 18 juin de 15h à 16h30) et Les Principes de Jogjakarta +10 et la protection des droits des personnes transgenres (le 21 juin de 15h à 16h30). Il y aura aussi une rencontre conviviale le 19 juin de 18h30 à 20h30.

Vous pouvez envoyer un courriel à zhan [at] ilga [dot] org pour confirmer votre présence à ces événements. Vous pouvez également rejoindre la discussion avec le hashtag #UNTransAdvocacy

Premier rapport du nouvel expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre (IESOGI)

Cette session verra également la présentation du premier rapport du nouvel expert indépendant, Víctor Madrigal-Borloz, qui a pris ce mandat en janvier 2018. Le rapport examine la violence et la discrimination basées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre, leurs causes profondes et le soutien à des mesures étatiques efficaces, guidées par un cadre d’analyse intersectionnelle.

Le Service International pour les Droits de l'Homme (SIDH), conjointement avec 11 autres organisations, a soumis une liste d'obligations dans le chef des États qui, si elles étaient mises en œuvre, contribueraient à assurer la protection des défenseur-e-s des droits humains (issu-e-s de la communauté) LGBTI.

Le mandat de l'expert indépendant a été soumis dès le départ à une forte opposition de la part de certains Etats membres, d'abord par le biais de multiples tentatives pour bloquer sa création, ensuite par d’importants efforts pour saper son mandat une fois qu'il a été établi. Il est probable que ce rapport attirera également beaucoup l'attention des acteurs anti-droits au Conseil.

Lire le rapport de l'expert indépendant

Pas de résolution sur la « Protection de la famille » ?

Pour ceux qui ne connaissent pas le programme de « Protection de la famille » du Conseil des droits de l'homme, il s’agit d’une stratégie anti-droits dangereuse consistant à utiliser des discours prétendument inoffensifs sur la « protection de la famille » pour couvrir les violations commises contre des membres d’une famille, pour renforcer l'impunité et restreindre l'égalité des droits au sein et hors du cadre familial.

Depuis 2014, un groupe d'États a formé un bloc dans les espaces des droits de l'homme sous le nom de « Groupe des amis de la famille». Des résolutions ont été adoptées avec succès chaque année depuis lors.

Les responsables des résolutions sur la protection de la famille ont eu recours à une tactique récurrente pour retenir les informations sur la résolution jusqu'au dernier moment dans le but de maintenir les États membres et la société civile dans le flou. Il n'est donc pas encore clair si une résolution sera déposée cette année. Ce serait la première fois depuis 2014 qu'aucune résolution de ce type ne soit proposée.

Et aussi ... la visite du Pape !

Pour terminer, il a été annoncé que le Pape se rendra à Genève le 21 juin, notamment lors de la journée annuelle de débat sur les droits humains des femmes. Avec 40 000 personnes attendues pour le saluer - et certaines parties du réseau routier de la ville et de l'aéroport qui devront être fermées - cette visite aura probablement son importance dans le cadre des débats politiques sur le genre et la sexualité qui auront lieu pendant cette session clé du CDH. Un espace à surveiller !

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Analyses
Region
Global
Source
AWID